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OVERLORD |
Ce serait un jardin de longues envolées Une entrée dans le pays natal où respire l’Infini La tranquille et lente remontée vers le visage de l’Intime Un creux dans le silence murmuré d’une éternité Tu ne peux confondre le vent venu des horizons lointains Et le souffle naissant du pays des enfances. Véronique Guerrin ( Je vous remercie de me prévenir si vous voulez utiliser textes ou images qui sont ma propriété.)
vendredi 6 juin 2014
mercredi 4 juin 2014
Rémi Guerrin " Limons" vernissage d'exposition et signature livre Aux Editions LOCO PARIS
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#15
Juin 2014
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Loco Beaux livres : photo, architecture, art |
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Chez Loco : du 5 au 21 juin 2014 | |
Autour du livre LimonsExposition de Rémi GuerrinÀ l’occasion de la parution de la monographie Limons, Loco présente dans son espace un ensemble d’une vingtaine de tirages originaux (cyanotypes et autres tirages pigmentaires uniques) du photographe Rémi Guerrin.Vernissage le jeudi 5 juin à partir de 18h. En présence de Rémi Guerrin qui signera son livre et ses tirages de tête. |
"Zones d'incertitude". Une exposition au centre d'art Frontière$ / Hellemmes
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C’était un jour pluvieux, j’étais donc venu dans ce quartier de Lille- Hellemmes, où j’ai vécu il y a de cela de bien nombreuses années. Rien
n’a vraiment changé depuis mais n’est ce pas souvent ce que l’on se dit alors
que d’infimes choses ne sont plus les mêmes ? J’entrais alors dans la "contrée des
métamorphoses" appelée : "Zones d’incertitude". Un très bel espace, étendue centrée entre
ombre et lumière, et sur les murs, des images comme des miroirs, des masques ou
des reflets. Ce qui importe, c’est de laisser venir en soi les fragments des
étrangères pensées. Où est la mer ? Où est le ciel ? C’est d’ici, derrière le
rideau, que vient le clapotis des pieds dans l’eau. Encore et encore, marcher
sur le sable mouillé, se perdre dans les flaques des vagues. Vagues de nuages quand,
là bas, l’ enfance réinterprète le chant de l’eau.
Une île au loin, serait
ce un mont de terre ou cette « terreenmer »
qui nous attend, lieu conçu pour s’éloigner, s’enfermer, se terrer ; s’ouvrir et se refermer encore. Où sont les
huitres laiteuses ? Je vois des cicatrices marines et des éclats nuageux, en un incessant mouvement répétitif qui hypnotise,
lancinance qui emporte : presqu’un
mal de mer. Ce rythme balance le corps en
une danse d’ondes, d’iode, d’algues brunes et de goélands.
J’aimerai que la jeune femme à
la couverture s’enfuit sur la plage mouillée ; le coyote ne pourrait la
rejoindre, jamais. Descendre dans la fosse aux lions, c’est comme croiser les
coyotes. Porter la couverture rouge telle une robe de bal, je crois que c’est juste adapté à la poupée dans la vitrine d'un magasin de jouet ou qui sommeille au recoin désolé du grenier.
Marie de Magdala portait un vêtement d’écarlate lorsqu’elle brisa son amphore
emplie de parfums précieux. Porter cette teinte sur soi, c’est tout à la fois,
le rouge au front, une euphorie fleurie, une apothéose d’incendies,
un éclat de rire. Toutes ces vies qui nous couvrent, nous recouvrent : langues
de sable, trous dans la terre, creux des vagues, couvertures qui nous étouffent
et sont si lourdes, si intenses ; toutes
ces vies qui se superposent pourraient conserver en elles une odeur de
coquillages, devraient préserver une fragrance de jardin qui se réveille, mais
elles sont surtout imprégnées d’une chaleur embarrassante.
Ce corps féminin que je regarde
maintenant est costumé de viandes rouges, comme de pourpre et de garance, il dort ; nu, enveloppé de cette
chair vermeille, tendre ; le loup pourrait vouloir manger cette
belle fille au regard sans émotion, dépersonnalisé. Mais il n’y a pas de loup et surtout il n'y a aucune odeur alléchante. Les
loups sont morts et ils aimaient sentir la chair tendre, ce ne sont que des ogres déguisés.
Du scotch sur les yeux, sur la
bouche, sur la peau tendue,des lambeaux de papier transparent collé ! Pourquoi ne pas vouloir
voir ? Pourquoi se taire ? Ne plus bouger : en une attitude figée, sans expression, devenir le monstre.
La mort rode encore dans ce crâne
aux vers de sang comme une tête de Christ à la couronne d’épines ensanglantées.
Le rouge et le noir, tête rubis sur fond sombre, un feu dans la nuit ; la
lanterne incarnat des courtisanes au cœur de la nuit de Chine. Marie était elle
courtisane ? Cette fille s’appelle t’elle Marie ? Ces cheveux ne seraient qu'une perruque pour un carnaval dans les ruelles d'une Venise éphémère ?
Sur le mur, tout au fond, une
longue toile de mémoires et de rêves, gravure composée d’instants fugitifs, j’aimerai
noter quelques moments offerts par la vie et ainsi pouvoir dévoiler ce qui stigmatise et ce qui libère, ce qui est résilience. Des
lambeaux d’étoffes colorées, des bouts de couvertures, des morceaux de ciel, des vagues
libellées ; tout ceci, le voir, l'approfondir pour le noter, l’inscrire ; une correspondance entre
deux mondes, lire/écrire à la périphérie de tout.
Et je m’interroge ; si ce sang qui coule et s’opacifie,
c’était encore malgré tout le sang de l’enfantement ou le sang d’une
blessure ? La femme attend, assise, indolente quand plus loin, l’horizon
file, défile en une homogène confession striée de stigmates. Tout se ressemble toujours, croit t’on. Il
faudrait oublier d’être submergé en s’enlisant dans cet aquarium : c’est un
rituel de plongeon. Ce fond liquide et bleu identique à une averse mais
surtout, ne pas se noyer dans ce passage
humide où le niveau de l’eau monte et descend, rappelant le paysage empli de
clarté blotti dans la chambre claire. Il pleut ; l’eau tombe encore et
encore ; l’eau pleure sur les chairs ouvertes alors qu’un homme grimpe sur
le tronc de l’arbre, à l’horizontal sur le vertical : La croix du cœur est au
centre.
Voici que s’amoncellent des
lambeaux de brouillard. Quelques fantômes dansent lentement derrière le plexi translucide,
des gens sont là qui regardent et observent, ils passent derrière le voile,
mais il n’y a qu’une lampe et tout est caché.
Tu vois, ces cheveux qui
poussent, qui continuent de grandir comme nos ongles, même lorsque l’on est mort, c’est ainsi la persistance du moi qui se fragmente une
nouvelle fois.
L’obscurité enveloppe le crâne
de crins de chevaux, si blonds. Blond soleil jaune tournesol, juste la trace d’une
route ; ce serait un chemin
possible ; le sceau d’un cancer ou la trace d’une maladie nucléaire. L’empreinte
qui peut nous marquer tous un jour.
C’est une main recroquevillée
qui porte le sang des souffrances, les tient si près de sa tête, un malaise
vrillé à la peau. Il pleut ; il y a
un souffle de rire dans "ceci qui n’est pas cela" écrivait l'artiste, et qui déforme le réel.
On pense aux cheveux de la Gorgone, bienheureux sommes nous de ne pas voir les
yeux de cette créature ; ici, les serpents sont terriblement vermillons…
La voie est démontrée par une
main déjà couverte de sang. Allume la lampe rouge du studio, montre moi les images.
"Je suis sage, j’aurai une image", pense la fillette aux chaussures couleur de
cerises et d’étés.
Ce sont des vers luisants qui
grouillent, s’agrippent à mon regard, des feux d’artifice flamboyants ; une flambée
de coquelicots, de tulipes. Pigments broyés d’ocre et de maison close, feu stop :
alerte, il faudrait s’arrêter, arrêter le sang du sacrifice.
Nous traverserons la mer de
Moïse, elle brille dans nos têtes. Brûle, sois intouchable ! Les premiers morts étaient enterrés dans l’ocre
rouge : terre des immortalités mais,
là, dans le lieu clos, la vie quitte le
corps de la femme qui ne regarde rien ; le sang va encore continuer de
couler ; sa chair, de la quitter. Son
regard devient de plus en plus vide.
Trois blocs de béton : c’était
une maison ; une petite maison qui ne sera pas visible encore longtemps.
Le nuage rejoint l’échelle de la mer. L’image est prise et la maison demeure,
autoportrait et déjà, l’entrée dans un
autre apaisement scandé par les pieds qui marchent dans les flaques de la mer.
trois trous dans un désert,
rien d’autre que cet abandon : un
Doël sans graffitis.
Une argile de mémentos, d’oublis
et de pertes. Là bas, pourtant, ce si
paisible paysage presqu’évanoui s’étend vers une sente végétale ; il permet
de marcher jusqu’à la limite de soi même ; l’on aimerait y transporter
cette pauvre maison délabrée.
la première étape sur l’échelle
sera de marcher sur la tête du dragon, allant de la terre au ciel ; le
ciel est sur la mer. La mer est sur la terre. Encore une fois, entrer dans un intervalle qui n’est
pas vraiment un repos mais qui est constitué de sable crissant et de
coquillages brisés.
A l’infini des autres « soi
même », ce serait moi : un autre "je" qui joue dans la zone des écorchures. Les pigeons s’envolent
sur la route éclaboussée de voitures.
Ne pas verser le sang de l’autre,
mais voir et regarder le tien, ton sang, le voir couler comme un don possible ;
donner son sang, recevoir le sang. Le corps est un calice. Ceci est mon corps,
j’inscris en lettres de terre sur le parchemin gris et noir toutes ces
solitudes qui se souviennent et j’arpente le golfe inondé. Si tout à coup la
mer montait, nous resterions prisonniers, corps aux masques d’engloutis.
Cache toi dans le visage
muet, caches toi dans la couverture,
Beuys va frapper avec sa canne et moi, j’ouvrirai ces si longs rideaux,
chevelure de lys d’une dame blanche, ils
occultent le jardin, m’empêchent de regarder dehors. Cela me semble être une
chambre funéraire blanche, la chambre d’une Piéta, d’aube lassante. Que se
passe t’il derrière cette fenêtre si vierge ? Voile blanc de noces, d’une
Cana ensevelie ou d’une femme enlacée aux herbes de l’onde, l’Ondine parcourue
de frissons.
L’ eau pâle, les traces blanchâtres
sur les écrits du temps qui s’enroule,
cette chemise immaculée, cette
main trop claire ; ces cheveux blonds, presque exsangues, ces trouées d’espaces
de non couleur, ces nuances crayeuses nous encerclent, tracent la frontière
entre le visible et l’invisible. Le corps sortait du tombeau blanc, enveloppé d’un
linceul. C’était le voyage de l’albinos sur la lune livide. Ou la présence de l’ange
devant la pierre roulée. Quand j’entrerai dans le sanctuaire crépusculaire, en
ce moment où le monstre perdra son identité, je me poserai cette
question : où sont les oiseaux et
les écureuils ? Où sont les enfants qui rient et les filles des rois ?
Il n’y a pas de gerbes de fumée,
ni de vieille femme édentée ; il n’y a plus de monstre, ni de figure
striée de ruban scotch, ici, la géométrie est palpable, comme une maison attentive,
pourtant, tout est en substance encore, en devenir, à la limite des invisibles rêveries
humaines ; les gens qui parlent font un bruit de pluie, de flic flac et
clic et clac ; 1, 2, 3, soleil, que s’ouvre la rose rouge mais ici, point
de miroirs et point de fleurs ; des murs blancs et des lumières indirectes.
Un bel interstice au centre de
la foule, où rien ne s’immobilise : lieu des degrés de la Némésis. Je voudrai
pourtant voir un rayon d’or ou une abeille, entendre le chant d’un canari vert,
caresser un chat roux. La nef de Noé a fendu les flots, on dit que l’eau peut être
verte ou si bleue.
C’est une histoire de genèse, il
faudrait gravir les barreaux de l’ échelle
qui relie le ciel et la terre, c’est cela peut-être : abolir toutes
discriminations, savoir monter et savoir descendre, aller du bas vers le haut
et de haut en bas, perdre sa balle en or dans le fond de l’eau, faire confiance
au vert batracien et pour atteindre le barreau maître, il faut vraiment qu’il fasse
très beau ; c’est la grenouille qui
le fait le mieux, surtout la grenouille des contes.
Véronique Guerrin
Véronique Guerrin
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