dimanche 11 novembre 2012

Strange days...

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Pour A.

" Et je me dis : je suis un enfant de Septembre,
Moi-même, par le coeur, la fièvre et l'esprit,
Et la brûlante volupté de tous mes membres,
Et le désir que j'ai de courir dans la nuit
Sauvage, ayant quitté l'étouffement des chambres. "

Patrice de La Tour Du Pin ; "les enfants de septembre


Photographie anonyme. 
Une branche craque. Les oiseaux s'enfuient, hautes envolées pour une terre sacrifiée. Quel chant s'élèvera ainsi, ici,  rares sont devenus les visiteurs. Il n'y a plus de miroir sur le mur où alors, je crois qu'il est brisé. Ce n'est pourtant pas un lieu de fantômes errants. Non, juste un cimetière d'hier, un endroit désert et déserté où s'accumulent les poussières et les feuilles.
Un lieu où les pas ne laissent pas d'empreintes. Un lieu dont personne ne se souvient. Que s'est il passé là il y a longtemps ? Qui a vécu entre ces murs délavés, offerts au vent, au soleil et au rire de la pluie ? Qui a chanté dans cette église désaffectée ? Comme une gare perdue. No man's land. Un nulle part sans personne. La cheminée ne fume pas.
Quelques enfants sauvages comme l'écrit le poète, quelques enfants perdus viennent jouer ; à cache-cache entre les graffitis et les racines noueuses des arbres exaltés.
Une porte entrouverte, béante, une fenêtre aux bras ouverts. Les autres sont absents. Une éternelle absence. Un vide s'insinue en nous. J'ai cette crainte qui se love en moi de gravir les marches de l'escalier. Vers quoi mène t'il ? Que trouverai je là haut ?

J'imagine une femme en robe blanche, un enfant penché sur la balustrade. C'est l'été, un bel été aux éclats d'or et de joie. Des paniers de fruits dans la cuisine.

Je vois une procession aux bannières bordées, la porte de l'église s'ouvre lentement. Des feuilles de laurier jonchent le sol de mosaïque.

Dans la chambre aux tentures lourdes et bleues, un vieil homme assoupi rêve. Il mange des fraises, assis sur le bord d'une route. C'est comme dans un film, tout ressemble à des images de cinéma.
Bientôt de ces ruines abandonnées jailliront des scènes de vie et de songe.

Peut-être que l'on aime vraiment les friches, les lieux perdus, car on explore sa propre intériorité, sa propre mémoire. J'aime ce qui est perdu, comme Peter Pan qui parle toujours des enfants perdus...  Peut-être que l'on se "perd" en ces endroits sans vie, sans humanité car on se plonge ainsi dans un état d'abandon. On devient réceptif. On se retrouve soi même  en arpentant ce qui n'appartient plus à personne. Aucune agression. Aucune présence. Soi même avec soi même.

Je pense à Tchernobyl, aux friches photographiées. Ici ou là bas. Partout ou ailleurs est toujours une part de notre âme. On dit que depuis que l'homme ne vit plus à Pripriat la nature devenue reine est majestueuse et féconde, un nouvel Eden. On dit que...

Et notre âme est vagabonde.

Petit oiseau solitaire sur le bord de la fenêtre. Vitre cassée. Jonchées de débris de verre. Il n'y pas d'ombres ici. Juste le reflet du ciel dans ton regard. Je regarde au loin. Une jeune fille assise non loin de la maison tourne la tête.

Tout est calme. Trop calme ? Je ne le crois pas. Tout est parfait. Entre les herbes et les feuilles scintillent les mots ensoleillés.  Pattes de chat gravées dans la poussière du salon.

Lumière de lune pour un étrange voyage. Etrangers dans la nuit, c'était une chanson que j'écoutais au coin du feu quand tombe la neige.

Croisées de cailloux et de fleurs. Les ronces sont figées. Je n'entends que le bruit de mes pas. Toujours un écho. Qui résonne. Lorsque tu parles, quand tu chantes dans les pièces de la maison, le ton de la voix monte très vite entre les murs vides. C'est un élan, une traversée du corps.

A l'oblique du monde : dans un intervalle de temps, une nouvelle danse, un autre rire, les éclats de la vie comme une belle joie naissante.

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