jeudi 24 septembre 2015

l'heure bleue /4 / cyanotypie







dans la pluie de septembre



J’aimerai une plage et un bateau blanc
Une maison posée face à la mer
Comme une île de silences et d’écumes

Chaque jour, chaque nuit, quitter ses émois et ses désirs
Ne plus avoir de souhaits
Oublier les effrois

Que savons-nous de la mémoire que porte en eux les migrants ?

Des femmes aux cheveux d’algues dansent sous les rires des étoiles
Les étoiles deviennent folles, elles tournent à l’envers
Un vieillard en costume de marin se tient devant la porte de la maison close
Les volets sont fermés
Au jardin des lotus elle chante et s’endort



Des parfums d’iris et de lys mais aussi de fleurs fanées
Les elfines s’avancent lentement sur l’herbe mouillée
Le vent est trop fort, des bourrasques cassent les branches des arbres
Si par hasard tu peux entendre la musique des sphères
Si par hasard tu t’éveilles au bord de la fontaine
Si par hasard tu ne sais plus rien

Quand viendra l’autre matin ou l’autre nuit
dans la solitude et l’obscurité
n’aies pas de crainte, il est bientôt  temps
Le soleil revenu, le jour qui se lève

Pourquoi le vent et la peur ?
Le monde est si grand dans le regard de l’enfant
La prison c’est le fouet des paroles
Le mensonge, il faut vivre dans la folie, les espaces où tu ne sais où tu vas

Partir est une illusion
On ne quitte jamais rien

Dans ton cœur les errances sont noires et blanches
Merlin lance des poudres d’argent sur la tombe de pierre
Le poète marche en composant
Et tu ne sais vers où tu pars, tu ne sais où tu vas

Un jour à l'hôpital




Vue /5 ème étage Hôpital B /4 septembre 2015

« Sur un fil blanc
Traine un clown blanc »

Les enfants terribles me trottaient dans la tête
Là, au cœur de cette chambre aux murs trop blancs,
C’était le grand bateau, le B, 5ème étage
Il faisait beau, nous pouvions voir les champs au loin,
Le jour s’effilochait comme le ligament du genou du jeune homme
Une longue opération Rondes de jour, rondes de nuit
aux ondes lumineuses de lampes de poches,
Le clown est parfois triste, juste une esquisse de peine, souvent assoupi, douloureux,

Cherche le rire, la joie
de ses yeux emplis d’humour il accroche la lune à ton corps
comédien et clown pour les enfants hospitalisés, c’est lui cette fois ci qui se trouve dans un lit mais aucun clown ne lui rend visite
actionnons le le zygomatic attention au croc'codile ! Et tic et tac

Je pense à docteur Patch qui disait : «  l’amour est contagieux » Passe passe le temps Il n’y a plus de temps à l’hôpital
C’est un rythme de découpage de ta chair en morceaux la jambe la tête le ventre
Des petits bouts de toi Parer la chute
Petits pieds d’enfant dans un long songe où le petit rit, s’amuse
 s’allonge pour prendre la main de l’homme au nez rouge,
au masque de Pierrot,
Pas de deux Pas de rondes Pas de ronds dans l’eau de la bassine
Pas de bulles sur la terre humide Peut-être des bulles de savon
Savonne-toi le bout du nez, ah oui, la cheville, oui on verra ça plus tard…

1200 mètres en altitude Chute libre en dérive
Ouverture trop brusque, trop forte du parachute
Descente à la verticale Douleur à la cuisse, blessure
Impression de sombrer Lutter
Libérer la voile de secours
Chambre de nudité, d’exploration d’un néant qui attise l’absence,
 le désir de fuir, de ne jamais plus revenir

« Je vole où m’entraine les mots » chante la femme

Juste ce temps qui semble si long, s’étire
Cette attente du futur départ
L’ascenseur en panne a grincé durant toute la nuit
Impossible de dormir Toujours la même position Le mur en face de toi

Parfois quelqu’un passe Rien ne se passe Tu as mal Tu es dans la patience A force tu t’impatientes
Une attelle bleue marine, ouverte, fermée,
Une entorse de cheville bien ronde comme la ronde des infirmiers

Le clown rêve d’une dame blanche
Les dames en blanc n’ont pas compris N’ont pas rit A peine un aperçu de sourire
Pour la dame blanche il est préférable de ne pas trop y penser !

« Tu vas sur un long fil /Tu fuis /Tu vas-tu viens et tu t’enfuis mais tu reviens et le spectacle va continuer applaudissez »

Les enfants terribles ne sont pas si terribles
Si la dame blanche se penche vers toi tu ne sais ce qu’il adviendra
Tu dors le jour Tu dors la nuit
Le grincement dans le cœur « comme passe passe le loup ou le vent, l’infirmier dans le matin endolori »

L’Hosto au bout de la route Chambre à deux lits
Le clown a sauté Le vide devant lui
Le parachute a « déliré » l’imprévisible accident
Parachute de secours, fractures, élongation, étirement, la longueur d’un autre temps lorsque tu tombes ainsi, flottement entre toi et ton autre toi,
Avec ses plaques de métal sur le tibia, il sera aimanté, il sonnera peut-être, dans quelques boutiques lors de ses courses

« Mais le spectacle va continuer applaudissez !
Sur un fil une femme hésite… »

Tire le fil du parachute ! Ne cours pas sur la terre gelée, attention au trou, genou vrillé, ligament croisé rompu
les enfants terribles chantent dans ma tête C’est un chuchotement

« Sur un fil blanc traine un clown mais on l’a peut-être oublié
Peut-être… »

Je ne sais pas s’il rêve d’une chute à l’envers de lui même
Tu descends et tu montes pourtant
L’humoriste appelait ça «  la chute ascensionnelle »
Maintenant il est dix huit heures il y a deux personnes dans la chambre aux murs si blancs,
Qui partageront leurs espaces nocturnes.

(extraits du "clown blanc" les enfants terribles)